Le long de la jetée
Le long de la jetée
Le long de la jetée
Ce soir, c'est le jour de la parade.
C'est écrit dans les reflets des vitrines.
Pablo vient guetter l'esplanade,
rouge comme un mégot de blonde platine,
avec ses martyrs en promenade
qui crachent leurs dents devant l'usine,
et ses filles en dessous des arcades
qui s'imaginent toutes que leur jour viendra.
La radio dit que la nuit sera tiède,
et dans les caniveaux des villes,
y a des enfants qui ont pas besoin d'aide
pour chavirer, c'est si facile.
Pablo sait bien qu'y a jamais de remède
et qu'après tout tant que t'as du style,
tu regardes tes peurs qui vont et viennent,
t'oublie même l'exil, mais lui t'oublie pas.
Y a des cathédrales sur le sable
pour les vieux mariés qui se promènent.
Des guerilleros en croisade
qui pleurent pas tant qu'ils ont de la veine.
Y a même une fille aux doigts de jade
qui regarde les pétroliers qui traînent.
Pablo connaît le prix de la balade,
faut s'ouvrir les veines.
Personne se remet de ça.
Le long de la jetée
personne prend le deuil.
Quand on t'emmène
le long de la jetée,
t'as que ton orgueil
et puis ta peine.
Vaudrait mieux rester debout cette fois
tant que t'as de la veine.
Va falloir guetter sous la pluie.
Va falloir courir seul sans bruit.
Va falloir chercher si longtemps
pour trouver l'autre bout de la nuit.
Pablo traîne tout seul sur la plage,
il sait qu'y aura jamais de fin tranquille.
Pour faire monter le prix de sa rage,
les bataillons de l'oubli défilent.
Ce soir, il veut les clés de sa cage
et tant pis s'il est trop fragile.
Il sera pas le seul roi sans visage
qui part pour son île et qui l'atteint pas.
En dessous de l'autoroute, la peur gronde
et Pablo sent monter sa fièvre.
Près du casino qui s'effondre,
faut du sang pour payer les rêves.
Ce soir, la ville est si profonde,
Pablo comprend que la nuit sera brève.
Il voit venir les danseurs de l'ombre,
maintenant y a plus de trêve mais ça l'inquiète pas.
Le long de la jetée
personne prend le deuil.
Quand on t'emmène
le long de la jetée,
t'as que ton orgueil
et puis ta peine.
Vaudrait mieux rester debout cette fois
tant que t'as de la veine.
Va falloir guetter sous la pluie.
Va falloir courir seul sans bruit.
Va falloir chercher si longtemps
pour trouver l'autre bout de la nuit.
Au dessus de la plage, la brume se lève.
Derrière ses lumières et ses rêves,
la ville se réveille.
Cachés dans le fond de leur lit de doutes,
sans bruit les amants de la déroute
entonnent leurs prières.
Toutes les sirènes de la police
viennent découper des précipices
au creux de leur sommeil.
Près d'une église de sable,
abandonné dans la nuit,
Pablo s'est allongé.
La plage est devenue rouge
le long de la jetée.
Hier, c'était le jour de la parade
et dans les reflets des vitrines.
Pablo venait guetter l'esplanade,
rouge comme un mégot de blonde platine,
avec ses martyrs en promenade
qui crachent leurs dents devant l'usine,
et ses filles en dessous des arcades
qui s'imaginent …